Rapport HAS 2019 sur la Lombalgie – Quelles recommandations ?
En raison de son impact sur notre société, en mars 2019, la HAS a émis un Mémo sur la prise en charge d’un patient présentant une lombalgie commune et ses recommandations notamment en kinésithérapie. En effet, cette pathologie, dans sa forme aiguë et chronique, est devenue à la fois un problème de santé publique avec un impact économique et social majeur, et un problème de santé au travail avec parfois pour conséquence une désinsertion professionnelle.
D’un point de vue épidémiologique, la lombalgie présente une prévalence sur une vie entière de 84% – 8 personnes sur 10 seront touchées au moins une fois dans leur vie par cette condition – avec une évolution vers la chronicité (durée supérieure à 3 mois) pour 6 à 8% de ces patients.
D’un point de vue économique, selon l’Assurance maladie, en 2015, la lombalgie aiguë était le 2èmemotif de recours au médecin traitant, 1 lombalgie sur 5 entraîne un arrêt de travail et c’est la 1èrecause de désinsertion professionnelle avant 45 ans.
Du point de vue de la prise en charge, le rapport souligne l’écart entre les recommandations et la pratique actuelle. L’imagerie (radiographie du dos) qui n’est pas recommandée (hors drapeaux rouges) a été pratiquée pour 2,6 millions de personnes en 2015. La kinésithérapie qui n’est pas recommandée dans les 4 premières semaines a été prescrite pour 37% des patients lombalgiques. Enfin les patients ayant un arrêt de travail entre 1 et 3 mois ont consulté un rhumatologue dans seulement 15% des cas.
Partant de ce constat, la HAS a publié ce mémo permettant d’améliorer la prise en charge à la fois pour les patients et pour les praticiens.
Qu’en est-il de la kinésithérapie dans le Mémo de la HAS ?
Le message principal du rapport est que la lombalgie commune ne nécessite pas d’action thérapeutique dans les 4 premières semaines suivant à la crise. Il est nécessaire d’établir le bilan diagnostic afin d’identifier la lombalgie et de maintenir un état de surveillance des patients pour déceler les différents indicateurs (drapeaux rouges – pathologies sous-jacentes), drapeaux jaunes (risque d’évolution vers la chronicité), drapeaux bleus (charge travail importante…) et enfin drapeaux noirs (environnement de travail défavorable… ). Pour toujours guider le praticien et le patient, la HAS a émis un arbre décisionnel permettant de déceler les différents drapeaux et les actes à mettre en parallèle. Cet arbre met en exergue la notion d’autogestion du patient sur sa pathologie tout en étant imbriqué dans un système de soin à l’écoute.
Lorsque le diagnostic de lombalgie chronique est posé (soit plus de 3 mois d’incapacité et/ou douleur après la survenance d’un épisode de lombalgie aiguë) ou lorsqu’il y a un risque de chronicité de la lombalgie (drapeau jaune), la prise en charge non médicamenteuse recommandée est l’autogestion du patient, l’activité physique et enfin la kinésithérapie. Pour cette dernière les recommandations sont les suivantes :
- Réalisation d’exercices thérapeutiques adaptés à la situation clinique, enseignés par un kinésithérapeute et reproduits à domicile (Grade B de recommandation)
- Le kinésithérapeute participe à l’éducation du patient (bienfait de l’exercice physique, lutte contre les croyances) (Grade AE – accord d’expert)
- La réalisation de la kinésithérapie doit faire appel à la participation active du patient (Grade B)
- Les thérapies passives ne doivent pas être utilisées isolément car elles n’ont aucune efficacité sur l’évolution de la lombalgie (Grade AE)
Une intervention psychologique de type cognitivo-comportementale dans la prise en charge des personnes présentant une lombalgie chronique ou à risque de chronicité avec ou sans douleur radiculaire est également recommandée (grade B) à condition d’être intégrée dans un programme d’exercices supervisés. Le Biofeedback faisant partie de ce type d’intervention, a démontré une meilleure efficacité aux traitements usuels ou avec un bras actif dans la prise en charge de la rachialgie chronique (Sielski et al. 2017).
Globalement la HAS recommande l’exercice physique à mettre en regard de la nécessité d’une participation active du patient pour une évolution positive de la lombalgie. Le suivi du kinésithérapeute est primordial pour ces deux fortes recommandations à la fois sur la lutte contre les croyances mais également sur l’éducation.
Ce qui n’est pas recommandé
L’un des éléments qui n’est pas mentionné dans le mémo mais dans le rapport d’élaboration du mémo, est que l’HAS ne recommande pas l’usage des ultrasons et des tractions lombaires dans la prise en charge de la lombalgie. Ces techniques ont été évaluées par les instances de santé belge, anglaise, américaines, danoise et canadienne, qui ont toutes émis un avis défavorable à leur utilisation dans le cadre de la lombalgie.
Il ressort également du rapport que les techniques manuelles (manipulation / mobilisation rachidienne ou des techniques portant sur les tissus mous) ne doivent être mises en place qu’en deuxième intention et uniquement en combinaison d’un programme d’exercices supervisés (grade B). Pour compléter, la MDT (McKenzie), n’a pas démontré son efficacité sur la prise en charge de la lombalgie aiguë (sur les critères de douleurs et d’incapacité), par contre, elle a démontré son intérêt sur la lombalgie chronique en comparaison à des exercices seuls mais pas par rapport à de la thérapie manuelle et exercices (Lam et al., 2018).
Pour compléter, les techniques suivantes ne sont pas recommandées ou uniquement en association avec des exercices supervisés par un kinésithérapeute selon ce même rapport dans la prise en charge de la lombalgie chronique :
- La neurostimulation électrique transcutanée ou TENS n’a pas montré d’efficacité sur l’évolution de la lombalgie
- Ceinture lombaire ou contentions lombaires rigides n’ont pas montré d’efficacité sur l’évolution de la lombalgie mais elles peuvent être envisagées sur une courte durée pour aider à la reprise d’activité
- Les semelles orthopédiques ne sont pas indiquées dans la lombalgie chronique (Grade B)
- L’acupuncture, acupression et dry needling n’ont pas démontré d’efficacité sur l’évolution de la lombalgie (même si les instances américaines et canadiennes recommandent l’utilisation de l’acupuncture)
Les thérapies passives évaluées (la chaleur, les ultrasons, la cryothérapie, le kinésiotaping, le TENS…) sont contre-indiquées en raison du manque d’activité du patient qui semble être un point très important dans l’évolution positive de la lombalgie. Seule la chaleur a montré un intérêt dans la diminution de la douleur.
Ce qu’il faut retenir
Le kinésithérapeute est au centre de la prise en charge, tant sur le diagnostic de la lombalgie commune, que sur le suivi (accompagnement sur les exercices, éducation sur les croyances, les bons gestes…) ou la sortie du processus de douleur ou d’incapacité. Il est important de fournir des outils qui permettent aux kinésithérapeutes d’agir de façon personnalisée sur leurs patients tout en leur permettant d’être actifs dans leur rééducation. C’est ce que nous avons voulu créer avec le Blueback Physio , en apportant un outil permettant aux kinésithérapeutes de vérifier l’activité d’un muscle participant à la stabilité de la colonne vertébrale tout en réalisant des exercices. Le patient peut comprendre sa rééducation car il voit le résultat des consignes et s’implique plus.